ARTICLE sur l'exploitation des fond marins ...
Exploitation des fonds marins: «Face à la Chine, il est urgent de rattraper notre retard»
FIGAROVOX/TRIBUNE - Quatre pour cent de la richesse des pays occidentaux vient de la mer, contre neuf pour cent pour la Chine, expliquent des membres de l'Académie de marine. Selon eux, notre pays doit donc accélérer sur l'exploration, et l'exploitation des ressources minérales, abondantes dans les fonds.
Alain Oudot de Dainville, Francis Baudu, Jean-Louis Fillon et Francis Vallat sont membres de l'Académie de marine, un établissement public national à caractère administratif qui a pour mission de promouvoir l'Idée maritime et d'en démontrer les implications auprès des pouvoirs publics, des décideurs et de l'opinion.
Le 11 février dernier, le sommet One Ocean Summit a cherché à relever le niveau d'ambition de la communauté internationale sur les sujets maritimes, et parmi ceux-ci compenser grâce aux océans l'épuisement des ressources terrestres. La prudence s'impose car ceux-ci ont une telle importance pour la régulation climatique, la régénération de l'oxygène et l'absorption du CO2, qu'il est vital d'en mieux comprendre les mécanismes pour la protéger tout en améliorant la connaissance des 95 % qui restent à découvrir.
La mer est source de richesse - vérité rappelée de Thucydide à De Gaulle - pour qui «l'activité des hommes se tournera de plus en plus vers l'exploitation de la mer. Et, naturellement, les ambitions des États chercheront à dominer la mer pour en contrôler les ressources». 4% de la richesse des pays occidentaux provient de la mer, contre 9% pour la Chine. Si on prend en compte les richesses réelles et potentielles très importantes provenant des Zones économiques exclusives* de nos départements et territoires d'outre-mer, l'avantage est très nettement en faveur de la France. Le PIB chinois est gonflé par un rattrapage de développement , la croissance de sa flotte militaire et les travaux d'infrastructures liés à sa stratégie de développement de nouvelles routes de la soie («Yidai, Yilu»). Même si la croissance liée à ces trois éléments est appelée à se modérer, la France et l'Union Européenne ont beaucoup de retard à rattraper.
L'économie maritime englobe un vaste champ d'activités: l'alimentaire, l'énergie, l'industrie, les services, etc. Limitons-nous aux ressources minérales des fonds marins internationaux, aux ressources biologiques de la colonne d'eau de la haute mer, ainsi qu'à la circulation de l'information. La France se trouve dans une position géographique favorable, et a une compétence reconnue dans ces domaines.
Notre pays ne peut rester absent de l'accélération de l'exploration, et de l'exploitation des ressources minérales, abondantes dans les fonds, pour prévenir l'épuisement de certaines ressources terrestres annoncé vers 2050. Il serait tentant de rechercher une coopération européenne avec des pays de la zone indo-pacifique. Le préalable accessible est d'acquérir la technique pour atteindre la rentabilité et d'éviter de se disperser en privilégiant la recherche d'éléments rares. Ils sont nécessaires pour les techniques de pointe et s'extraient des sulfures hydrothermaux et des encroûtements cobaltifères. Leur recherche est cohérente avec l'orientation vers une nouvelle industrialisation, comme le développement d'une filière européenne de batteries. Les surfaces concernées par ces ressources sont nettement moins importantes que celles où sont répandus les nodules polymétalliques. Ce constat doit favoriser l'indispensable acceptabilité par les populations concernées.
La France a toute sa place dans la recherche des ressources génétiques marines (MGR). Ces composants du vivant, encore mal connus, que l'on trouve chez les animaux, les bactéries et les plantes, sont utilisés dans plusieurs secteurs d'activité de la cosmétique à la santé. Leurs perspectives de progrès sont importantes pour la médecine. 22.000 médicaments viennent de la mer pour les traitements contre le cancer (50% sont d'origine marine), ou le Sida, les antibiotiques, la transfusion sanguine, les anti-douleurs. Ils contribuent à la recherche de traitements contre le Covid-19. Leur développement requiert un investissement lourd mais les perspectives de retour sont riches et l'intérêt pour l'humanité immense. L'avenir des ressources génétiques marines est au cœur de discussions qui ont commencé en 2018 à l'ONU, en vue d'élaborer un accord sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales (BBNJ).
La conflictualité touche désormais les câbles sous-marins, artères de la mondialisation. Les chiffres illustrent leur intérêt vital: transit de 99% du trafic internet, flux de 10.000 milliards de dollars chaque jour et d'informations sans prix qui attisent la convoitise. Leur protection est une préoccupation majeure pour la France jusqu'à leur point d'atterrage en Bretagne et à Marseille.
Les thèmes abordés ne peuvent l'être sans prendre en compte la position des ONG, qui défendent l'environnement mais cachent parfois d'autres motivations derrière un paravent écologique. Il faut refuser les interdictions de principe, que cachent les propositions de moratoire assorties d'une durée de dizaines d'années. L'accent doit être mis sur les études d'impact. Dans le nécessaire dialogue avec ces organisations, il faut privilégier les approches fondées sur un «moratoire conditionnel», car elles sont seules capables de donner une vraie chance au développement durable authentique. Un moratoire sur l'exploration n'a pas de sens dans la mesure où il ferme la porte à une meilleure connaissance des océans, indispensable à leur protection. L'exploitation ne pourra se faire qu'avec la certitude de ne pas endommager les écosystèmes et la biodiversité marine.
Partant du principe que la prospérité se conquiert dans un climat de sécurité, il ne serait pas responsable de l'ignorer. La cyber-menace s'étend. Elle pousse à développer les parades dans le «soft ware», mais pour être cohérent le «hard ware», dont font partie les câbles, doit être protégé avec le même soin. Les capacités de surveillance et d'intervention de la marine nationale dans les Zones économiques exclusives françaises et le plateau continental étendu des différents océans doivent être améliorées. L'objectif est de contrôler les ressources dans ces zones et d'éloigner ceux qui s'en prennent aux intérêts nationaux et européens. Le 14 février, la ministre des Armées a tracé la route à suivre, en définissant sa stratégie ministérielle de maîtrise des fonds marins, nouveau terrain de rapport de forces.
Le One Ocean Summit a mis l'accent sur l'importance des océans - patrimoine commun de l'humanité - qu'il faut utiliser tout en les protégeant et les apprivoisant. C'est maintenant aux pays les plus naturellement amphibies de montrer la voie pour rendre leurs dirigeants hydrophiles.
*Une Zone économique exclusive est un espace maritime sur lequel un Etat côtier exerce des droits souverains et économiques en matière d'exploration et d'usage des ressources naturelles
Article co-écrit par Alain Oudot de Dainville (AA45), Francis Baudu (AA43), Jean-Louis Fillon et Francis Vallat
Le Figaro
16/03/2022
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