Compte-rendu du Voyage d'études en Irlande

Voyage d'études en Irlande - 27 avril au 1er mai 2016.

Cinq jours de voyage en Irlande ne sauraient permettre de porter un jugement tranché, d’autant que le pays présente de nombreuses facettes difficiles à saisir. Il paraît ici plus réaliste de se limiter aux impressions, d’ailleurs parfois contrastées des 15 membres de notre groupe, à l’issue de diverses rencontres, entretiens, visites; D’où les quelques remarques suivantes.

L’Irlande est attachante, chaleureuse, fière de son histoire et désireuse de la faire partager et comprendre. Ceci au sud comme au nord, en dépit ou à cause du poids que représente le passé. Nous avons toujours été fort bien accueillis, que ce soit à Dublin au Parlement, au Ministère des Affaires étrangères, ou de la Défense, ou encore par les différents interlocuteurs que nous avons pu rencontrer. Les sujets ont très généralement été abordés avec franchise, expertise et sans langue de bois.

Si l’Irlande est un petit pays (4,7 millions d’habitants), elle rayonne à travers sa diaspora d’environ 80 millions. La relation spéciale existant avec les États-Unis, étroitement liée à la présence d’une communauté irlandaise nombreuse en Amérique, nous a bien été soulignée. Le pouvoir électoral des descendants irlandais aux États-Unis pèse sur les élections.

Pays pragmatique, soucieux de son avenir et prêt à faire face aux difficultés, notamment au plan économique à travers des mesures fiscales drastiques à l’intérieur, mais aussi incitatives à l’extérieur, la République d’Irlande a su attirer les entreprises étrangères les plus dynamiques. Le fait que l’impôt sur les sociétés soit seulement de 12,5% n’y est pas étranger. En tout état de cause, les Irlandais réfutent tout caractère illégal de cette disposition. Autres facteurs favorables : une grande flexibilité en matière de droit du travail et un syndicalisme peu présent dans le secteur privé.... De plus, l’Irlande bénéficie d’une population jeune et bien éduquée. Il convient, par ailleurs, de noter les efforts en matière d’éducation, encourageant notamment les matières scientifiques et technologiques.

Avec un taux de croissance de 4,8% pour 2014 (le plus élevé de l’Union européenne) essentiellement du fait des grandes sociétés, l’Irlande exporte 80 % de sa production. Mais cela contraste avec le peu de croissance en dehors de la capitale de Dublin (mis à part le tourisme). On note la fermeture de plusieurs bureaux de poste, postes de gendarmerie, pubs à cause de la crise, en dehors de la capitale.

La situation bancaire n’est toujours pas totalement équilibrée. Les PME (67 % du GDP et 80 % de l’emploi) souffrent toujours d’un manque de financement et de taux d’intérêts plus élevés que dans le reste de l’Europe. Tout cela est dû au manque de concurrence en matière d’offre bancaire !

Pays « européen » conscient des atouts que représente l’appartenance à l’UE, volontariste et réaliste, ce pays exprime le souhait pour lui vital, de demeurer au sein de l’UE. Pour ce pays « neutre » militairement, mais délibérément engagé aux côtés des pays occidentaux, et actif dans les opérations de maintien de la paix, les problèmes de sécurité prennent ici aussi une nouvelle actualité, avec notamment la reconversion d’anciens chefs de guerre d’Irlande du Nord dans les « affaires », c’est-à-dire dans des « alliances » avec divers trafiquants (drogue, prostitution, blanchiment...).

Pour ce pays divisé qui souffre encore ici et là de la crise, le contraste entre Dublin et Belfast est très fort. Les oppositions politico-religieuses ancestrales semblent persister par ailleurs, et il faudra vraisemblablement au moins une génération pour guérir les plaies des conflits passés. Si Trinity College à Dublin, créé par Elizabeth 1ère pour contraindre les catholiques à la conversion est aujourd’hui, nous a-t-on dit, une université assez ouverte, à Belfast, la visite des deux quartiers « sensibles » nous a montré deux communautés vivant toujours dans des quartiers séparés par un mur et des portes de fer qui sont parfois fermées la nuit. Les enfants de chaque communauté fréquentent des écoles distinctes. Nos guides successifs, au lourd passé d’activistes, passionnés et attachants, militent aujourd’hui en faveur de la paix. Une paix sans doute fragile ? D’aucuns dans notre groupe, l’ont ainsi ressenti. Des assassinats récents, auraient donné lieu à des enterrements rappelant le passé...

L’Irlande souffre depuis la crise d’un taux d’émigration élevé. Ceci contraste avec une arrivée massive d’immigrants (16-18 % de la population), laquelle commence à peser sur ce peuple qui a toujours fait preuve d’un sens certain de l’accueil, compte-tenu de son passé d’émigration et du besoin de toujours s’intégrer rapidement.

Quoi qu’il en soit, la question du BREXIT a été omniprésente dans nos entretiens. Avec la crainte qu’au-delà des problèmes économiques que cela pourrait entraîner, l’apparente stabilité / co-existence, entre les deux communautés ne soit remise en cause. La sortie du Royaume-Uni de l’UE aurait en effet pour conséquence la reconstitution d’une frontière entre la République d’Irlande au sud et la province britannique d’Irlande du nord, augmentant encore les disparités de développement et de niveau de vie.

Mais pour conclure sur une preuve de l’optimisme indéniable des Irlandais, le bail de 9000 ans signé en 1789 par Arthur Guinness lors de l’installation de son usine près de la Liffey à Dublin, n’a pas manqué d’être mis en avant !